Chiapas – 2

Nous faisons notre retour au Mexique par les montagnes du Chiapas. Sortir du Guatemala par la frontière de Cuauntémoc après Atitlán fut la pire route jamais traversée depuis notre départ. Une circulation de dingues, des lacets, de la pollution et des toppes à n’en plus finir. Heureusement que le passage de frontière fut qu’une simple formalité n’ayant pas interrompu l’autorisation de circulation du van. Cependant, l’arrivée dans le Chiapas est la plus belle des récompenses que l’on pouvait attendre. Avec son abondance d’eau au coeur de la jungle, c’est à notre goût l’un des états les plus remarquables du Mexique. Son histoire Indienne et ses révolutionnaire zapatistes le rende encore plus unique.

Lagos de Colón

Aussitôt après les formalités de passage administratifs, nous nous dirigeons directement sur les lagos de Colón. A peine une heure de route et nous voilà au paradis.

De l’eau partout !! Atitlán et ses eaux polluées laissent place aux eaux translucides qui se déversent de tout part sur les lagos de Colón. Les habitants du village nous disent même pouvoir la boire ! Il y a tellement d’eau que l’on traverse des rio débordant sur les voies pavées. Entre cascades, bassins, rivières, torrents, c’est un vrai centre aquatique naturel et préservé d’où les familles mexicaines se réunissent pour camper le temps du weekend. On se pose au bord de la rivière, les pieds dans l’eau…  Température douce, nuit calme et étoilée, tout pour se remettre d’une longue journée route et passage de frontière.

Ah dire la vérité, et le ressentir comme une évidence aujourd’hui, le Mexique déborde de petits paradis à l’eau pure et c’est un énorme plaisir de s’y frotter à nouveau. Un petit tour au supermarché de Comitán, pour remplir le van à sec, nous rappelle combien le Mexique se détache de ses voisins d’Amérique centrale. Pays à deux vitesses, il ne rivalise pas encore avec les USA et le Canada, mais il paraît largement moins pauvre que le Guatemala et les pays plus au sud.

Les 5 cascades d’El Chiflón

Tout près de Comitán de Domínguez, il existe un lieu aux eaux turquoises chutant de cascades allant de 25 à 120m de haut !

Une fois sur place, il nous faut pas longtemps pour voir qu’El Chiflón est un mix entre Semuc Champey au Guatemala et Agua Azul, site ultra-touristique du Chiapas. A la seule différence qu’en amont de ce rio bleu turquoise, le visiteur peut aussi s’enchanter des cascades aussi différentes les unes que les autres. A condition par contre d’en faire l’ascension sous un soleil écrasant.

En ce dimanche, toutes les familles sont réunies à l’ombre des palapas. Le site est bondé mais couleur locale. A croire que le site d’Agua Azul est réservé aux touristes étrangers ! Sur El Chiflón, aucun rabatteur, aucun marchand, juste des places où se réunissent petits et grands dans un cadre distrayant et grandiose à la fois. Le site est si bien que nous pouvons poser le van au bord de la rivière avec barbecue et palapa pour habiller notre soirée en mode retour à la nature…

Las Guacamayas et les ruines Maya de Yaxchilan

Depuis El Chiflón, nous repartons au sud sur la Ruta Maya qui longe la frontière avec le Guatemala. La route s’enfonce en lacets dans un paysage verdoyant en plein territoire zapatiste. L’ambiance chaude et éclatante de la jungle est vraiment notre favorite. Les kilomètres qui nous attendent pour faire cette boucle de Chiapas sont largement motivés par ce dernier appel de la jungle et de sa faune. Plus au nord du pays, ce sera le retour à la poussière, alors c’est maintenant ou jamais.

Les postes militaires se succèdent en chemin allant du contrôle de passeports à la fouille intégrale du véhicule. Les filles détestent que la police ou les militaires les sortent en pleine lecture. Et nos 1ers réflexes sont systématiquement de planquer boissons et vivres frais.

Las Guacamayas est un tout petit village au coeur de la jungle du Chiapas. Il sera une étape avant de rejoindre les ruines Maya de Yaxchilan. Notre bivouac, nous permet de se réveiller à nouveau par les cris des singes hurleurs. Au petit déjeuner, les aras survolent nos têtes tandis que les filles jouent avec la petite Kyla de 15 mois qui voyage avec ses parents depuis le canada. Le spot iOverlander font toujours les rencontres. Las Guacamayas est une porte sur une nature luxuriante. Le large rio qui borde le village rappelle des paysages d’Afrique. Femmes et enfants pêchent le poisson à la bouteille sous les cris des singes omniprésents. Une nouvelle fois, Rodolphe est photographié avec des jeunes filles qui veulent être à ses côtés. Un peu comme Valentine mais avec moins de facilité tactile, les yeux de Rodolphe plaisent aux locaux !

Une piste cabossée nous mène ensuite à Frontera Corozal. Village d’accès aux ruines par les dizaines de lanchas qui accompagnent les visiteurs venus se perdrent jusqu’ici. Nous trouvons notre compte auprès d’un petit hôtel avec accès aux services et mise à disposition d’une lancha pour se rendre aux ruines Mayas au soleil couchant. De part notre expérience, la faune est toujours plus déchainée à l’aube ! Le rio qui borde Frontera Corozal fait la frontière avec le Guatemala. Et comme de part hasard, pendant notre traversée, des hommes interpelleront notre bateau à grands cris et bras levés. « On sait pas nager » disent-ils. « Pouvez-vous juste nous faire traverser ? ». Il s’agit en fait de migrants honduriens souhaitant atteindre les USA en train de marchandise et travailler pour une misère vitale à leur famille. On décide de les joindre à nous pour les amener un peu plus loin sur la rivière et assez près d’un village pour leur épargner des heures de marche dans la jungle. Le jaguar rode la nuit dans ces parages… A discuter avec ces 8 hommes de tout âge, les filles découvrent de nouvelles réalités : le travail illégal, l’immigration clandestine, la survie… En se quittant, les gars nous remercierons avec la grâce de Dieu et le guide de lancha ne se privera pas de leur demander 50 pesos chacun…

Au bout d’une heure, le bateau nous dépose aux pieds du site Maya. Le site de Yaxchilan n’est pas particulièrement remarquable, mais sa situation en pleine jungle en font un site préservé et procure une visite très agréable. Toucans, aras, singes et même crocodiles, toute une faune à portée de mains. C’est un crochet qui valait largement le détour !

Las Nubes

La route qui ramène au nord à San Cristobál délimite la frontière entre le Guatemala et le Mexique. Cela conduit à une bonne dizaine de postes militaires qui filtrent toutes ces nombreuses opportunités de passage clandestin. Entre les migrants et les trafics de drogue, les militaires ont de quoi s’occuper. On avance tranquillement entre fouilles et interrogatoires vers un paradis à Las Nubes. En chemin, nous ne sommes plus surpris de devoir payer des taxes pour la qualité de la route. Les hommes sont affublés d’un gilet affichant « Police », cousu main ou acheté chez au chinois du coin. Ce jour-ci, un collectivo devant nous, décide de défoncer la cordelette qui fait office de barrage. L’occasion est parfaite d’observer la stratégie de nos soit-disant policier. Et ça n’y coupe pas, les gars sortent leur talky-walkies et une course poursuite s’engage entre le mini-bus et deux hommes en scooter. Très drôle ! De notre côté, on se contente seulement de discuter le prix de moitié.

Une fois arrivés à Las Nubes, posés dans le balneario, c’est encore un nouveau spectacle de la nature. Les toucans sont des dizaines sur les arbres qui nous entourent. Les eaux sont bleues turquoises et s’engouffrent en tourbillon dans des crevasses où mieux vaut ne pas tomber. Ce coup-ci, les tourbillons sont clairement visibles, on ne se risque pas dans les bassins retenant la leçon d’El Chiflon et c’est bien sagement que l’on se baigne dans l’espace prévu à la baignade. C’est après coup que nous avons appris qu’il était dangereux de se baigner en dehors des zones de baignades à El Chiflón. Cela n’empêchera pas de se retrouver nez à nez avec un serpent nagouillant aussi comme nous avec beaucoup plus de fluidité que nous.

Nous sommes en pleine vacances de la Semana Santa. Le balneario affiche complet. Les mamies campent ou dorment dans les voitures avec enfants et petits enfants. L’esprit familial est systématiquement présent…

San Cristobal de las Casas : ville culturelle du Chiapas

Ce pueblo magico, perché à plus de 2000m. marque l’époque coloniale espagnole du Mexique. C’est ici qu’à eu lieu une révolution entre l’armée zapatiste et le gouvernement mexicain dans les années 1980. A l’époque ce groupe révolutionnaire politico-militaire représente et défend les droits des populations paysannes dans l’état le plus pauvre du Mexique. Ils font le choix d’assumer par leurs propres moyens la construction de leurs infrastructures, système de santé, d’éducation ou encore de production agricole. Ces rebelles refusant la paix, ont aussi tendance à trouver quelques fonds monétaires dans les poches des badauds interceptés sur les routes. Les situations pouvant parfois dégénérer au drame… la route la moins fréquentable étant celle reliant Palenque à San Cristobál. Pour nous rien de palpable mis à part quelques panneaux dans les villages précisant l’entrée en territoire zapatiste. Aujourd’hui, la lutte s’essouffle et des poupées « zapatistes » se vendent même dans les boutiques ! Ce mouvement a crée un détournement marketing.

Nous avions beaucoup entendu parler de San Cristobál. Cette ville plaît aux voyageurs et nous étions assez impatient de la découvrir de nos propres yeux. Seulement, une fois arrivés, rapidement quelque chose nous dérange ici. Une sorte de clivage, assez fort, trop marqué. Femmes et enfants indiens à la tenue traditionnelle vendent des babioles faites mains face aux échoppes chics des ruelles. C’est comme si la culture et l’histoire étaient restées accrochées aux plus démunis alors que la classe supérieure s’en est désencombrées pour chercher un style plus américanisé. La ville est cependant très belle, bien entretenue, façades coloniales refaites à neuf. C’est pas surprenant en sachant que beaucoup d’étrangers investissent ici dans le commerce ou la restauration.

Il est difficile de trouver un bon spot pour passer nos nuits sur San Cristobal mis à part un ranch tenu par un américain. Aucune négociation possible. Et n’étant pas adepte des parkings de supermarché, on restera sur le ranch mais seulement une nuit. Compte-tenu du prix, nous userons tout de même de la cuisine à disposition pour une soirée galettes / crêpes ! A la nuit tombée, les températures sont si fraîches que nous retrouverons en revanche le plaisir du cocoon sous la couette.

Clémentine fête ses 12 ans au matin de notre dernière journée dans le Chiapas. Elle se réveillera dans un orphelinat et pourra apprendre beaucoup sur la prise en charge des enfants abandonnés du pays. Leur avenir dans cet orphelinat parait bien plus prometteur que dans la rue. Nous sommes vendredi saint et amenons désormais notre sainte adolescente sur les plages du Oaxaca !! Elle souhaite juste nager pour fêter son anniversaire… qu’à cela ne tienne, nous sommes au Mexique, où tout est possible 😉

Written by Cécile